De ce côté-là, le travail de déconstruction de nos imaginaires reste à accomplir : on a beau rappeler que « rapport sexuel » et « pénétration » sont deux choses différentes qui parfois se recoupent, et parfois non, notre culture exige qu’il y ait une pénétration pour que le rapport soit complet. Cette pénétration est celle de l’homme sur la femme, via le pénis : le massage prostatique ne compte pas, les doigts ne comptent pas, les sex-toys ne comptent pas… et ça commence à faire beaucoup.
Le prix que notre société paie à la masculinité toxique s’alourdit, encore et encore, sans qu’on y réagisse autrement qu’avec fatalisme. Il y a mort d’homme, et ça n’est pas la première fois. En 2014 déjà, l’auteur du massacre de Santa Barbara (14 blessés, 7 morts dont le tueur) avait justifié sa folie meurtrière par l’incapacité à accéder au corps des femmes.
la suite après cette publicitéPour ces jeunes hommes, le sexe est un dû. Cette conception transactionnelle du plaisir ne sort pas d’esprits malades ou perturbés. Depuis la courtoisie médiévale jusqu’aux films romantiques comme Twilight, notre culture enfonce le clou : un homme gentil, qui montre patte blanche, qui ne se décourage pas, sera récompensé par des rapports sexuels avec une femme (tandis qu’un homme moins gentil, ne montrant pas patte blanche, obtiendra comme James Bond des rapports avec plusieurs femmes).
via Tommy
Retrouvé suite à une discussion sur Mastodon (merci Riff) :
Il faudra pourtant, à mon avis, étudier la sexualité pour comprendre les violences sexuelles. Nous avons longtemps dit – et c’était sans doute une étape nécessaire pour faire comprendre la gravité de ces violences – que le viol n’était pas du sexe comme si le sexe était par essence, non violent et exempt de rapports de dominations. Pourtant tout nous prouve, dans la construction de la sexualité occidentale, que le sexe entre hommes et femmes est traversé de rapports de pouvoir, de violence, de domination et d’abus. « Baiser quelqu’un » désigne à la fois le fait de pénétrer une femme (une femme ne baise pas les hommes dans le langage courant, elle est baisée) et le fait de piéger quelqu’un. Dans une société où le sexe ne serait que source de plaisirs et de joies, « se faire baiser » devrait être synonyme d’une situation très agréable. On dirait alors : « ah je suis allée au restaurant, j’ai très bien mangé, j’ai bien été baisée » pour qualifier son contentement. Or, non « se faire baiser » est synonyme d’une situation où l’on s’est fait avoir, où l’on se sent un peu ridicule, d’où rien de positif ne ressort. Le langage familier autour du sexe est lui aussi synonyme de violences, blessures, chasse, meurtre : baiser, défoncer, percer, trouer, casser les pattes arrières, bourriner, défoncer, déglinguer, etc. Les métaphores autour de la sodomie sont l’archétype de moments très désagréables ; ainsi les syndicats persistent, à chaque manifestation, à les employer pour qualifier des mesures jugées mauvaises. Encore une fois, si vraiment la sexualité était une pratique dénuée de rapports de pouvoir et de violence, pourquoi la pénétration qui en constitue une part importante, est-elle systématiquement synonyme d’événements négatifs ?
Guillaume Erner, hier sur France Inter, s’émouvait du fait qu’on puisse établir un continuum entre violences sexuelles et drague lourde. J’irai plus loin. Il y a un continuum entre la sexualité, au moins hétérosexuelle, et les violences sexuelles. Les réactions négatives aux témoignages de violences sexuelles en sont d’ailleurs un bon indice. Beaucoup d’hommes et de femmes sont totalement incapables de percevoir que ce qui pose problème dans les violences sexuelles est le non consentement de la victime. Comment le pourraient-ils ? Est-il tellement pris en compte dans ce qu’on appelle le sexe consenti ? Regardez des séries, regardez des films, lisez ! Constatez le nombre de fois où l’on sent les femmes totalement consentantes aux actes sexuels. Ils sont peu nombreux. Constatez les fois où leur non consentement nous est présenté comme excitant et prélude à une sacrée bonne baise.
Pour des raisons qu’on ne va pas détailler ici (la version courte : c’est à cause du patriarcat), on a décidé que l’acte sexuel véritable, celui qui plait à Dieu et à la Loi, c’est la pénétration du vagin par le pénis. Et le reste n’est, au mieux, que “préliminaires”. Et là j’ai presque envie d’être un youtubeur pour crier “FAUX” mais j’ai un peu de respect pour moi même.
Si vous aimez faire du sexe avec une personne à vulve, le meilleur conseil que je peux vous donner, c’est de vous débarrasser de cette notion de préliminaire. La fellation, le cunnilingus, les caresses, la masturbation, la pénétration vaginale et anale, la fessée, se mordiller les oreilles et se sucer les orteils : c’est du sexe, pleinement et véritablement. Les préliminaires, c’est, je sais pas, se brosser les dents chez soi avant le rendez-vous ?
[...]
La révélation :
Il y a un super moyen de savoir ce qui se passe dans la tête des femmes, de percer le mystère féminin : demandez-leur.
Un épilogue regrettable pour la Brestoise Christel Le Coq : « Evoquer le plaisir féminin est a priori encore inacceptable pour des gens qui pourtant mettent en valeur l'innovation... »
Le consentement, c'est un début, et c'est même indispensable pour ne pas devenir un violeur. Mais encore faudrait-il s'intéresser à ceux que veulent les femmes.
L'obsession autour du consentement réduit les femmes (puisque ce sont surtout les femmes) à un machin binaire qui dit oui ou non – une pure réaction, jamais une force créatrice. Dans un monde idéal, ces histoires de consentement seraient hors-sujet parce qu'une femme qui a envie de baiser serait actuellement en train d'attraper votre tête pour la placer stratégiquement entre ses jambes.
[...]
Bref. Tout ça se passe dans un monde idéal, sans slut-shaming. Dans un monde où une femme qui prend les devants ne se ferait pas traiter de traînée – et ne prendrait pas le risque d'être violée pour ses initiatives. Je l'ai déjà écrit, je le répète : à chaque fois que vous prononcez le mot « chaudasse » ou que vous jugez « gentiment » une nana entreprenante (vous êtes gentil, hein ? Si bien élevé) : vous créez les conditions de la misère sexuelle.
Cet article a une suite ici : http://www.gqmagazine.fr/sexactu/articles/la-gamification-du-consentement-sexuel-est-sur-nous-alerte/51475
Que la séduction puisse être un jeu ? Oui. Absolument. Mais qu'on gagne à tous les coups ? Bah non. Sinon ce jeu est faussé, et ennuyeux, et indigne. Si vous aimez jouer, vous ne pouvez pas vouloir gamifier le consentement sans gamifier l'opposition et le conflit. Parole de femme en chair : il faut être deux pour jouer.
Et c'est vrai que les poupées/robots/esclaves sexuelles évoquées dans l'article sont quand même vachement flippantes (mais moins que les mecs qui s'en servent quand même).
via Bronco
J'aurais aimé un peu plus de recul et d'analyse dans cet article, l'avis dun sexologue par exemple. Je ne dis pas qu'il n'existe pas des cas pathologiques, mais ils sont rares ; là, on a vraiment l'impression d'avoir un discours "moral" : la masturbation c'est mal... parce que.
Dommage, ça aurait pu être un super article gonzo, mais le souffle n'y est pas. Attention aux vignettes NSFW par contre.
L'inventivité humaine est sans limite ^^
Mouiiii.... Sauf que les réponses en ligne, ça risque fort d'être Porbhub 2h/jour... avec tous les effets induits sur la relation homme/femme, le consentement, la violence...
La suite de ce que je présentais ici : http://sammyfisherjr.net/Shaarli/?iNfQoQ#iNfQoQ
Énorme (si j'ose dire).
L’omniprésence du « porno » a créé pour les filles de nouvelles « injonctions : "La société du porno n’a fait que rajouter de nouvelles contraintes pour les femmes, qui ont intériorisé de nouveaux modèles définis par et pour les hommes."
via Kevin
Du coup, je suis tombé là dessus : http://www.franceculture.fr/emission-l-essai-et-la-revue-du-jour-la-fabuleuse-histoire-du-clitoris-revue-genre-sexualite-et-soci
"Il faut dire que le clitoris, s’il est repéré depuis longtemps, reste dans l’angle mort des manuels cliniques et des séminaires de sexologie. Il y a seulement quelques années, l’urologue australienne Helen O’Connell dénonçait le fait que lors des opérations de la prostate, toutes les précautions sont prises pour préserver les nerfs érecteurs alors que dans les interventions chirurgicales gynécologiques on ne se préoccupe aucunement de la neurologie intime des femmes. La raison en est que ce système nerveux n’est tout simplement pas décrit dans les traités d’anatomie.
Et pourtant, il fut un temps pas si lointain où les médecins considéraient l’orgasme comme un remède à la neurasthénie et à l’hystérie, suivant en cela la mécanique des fluides de haute époque hippocratique : pour maintenir les équilibres garants d’une bonne santé, point de rétention des humeurs corporelles et va pour l’orgasme médicalement assisté. Tout au long du XIXème siècle les femmes seules et dépressives, réputées inaccessibles à ces orages désirés, se faisaient manuellement stimuler la vulve par leur praticien préféré afin d’atteindre le nirvana. « Cette activité – nous dit l’auteur, sexologue clinicien, avec une pointe de nostalgie – représentait environ un tiers du chiffre d’affaires des médecins ». Une véritable rente sur un marché très stable, puisque les hystériques ne risquent pas de mourir de leur maladie, pas plus qu’elles ne peuvent en guérir. En revanche la pratique pouvait se révéler chronophage, certaines femmes nécessitant jusqu’à une heure de stimulation thérapeutique.
C’est sans doute pourquoi on imagina en contexte thermaliste un dispositif plus efficace pour ce siècle industriel, une machine qui peut à bon droit être considérée comme l’ancêtre du vibromasseur, d’abord à manivelles ou à pédales, puis à vapeur et enfin, grâce à la fée électricité, dotée d’une miraculeuse autonomie. L’auteur note au passage que le vibromasseur allait être le quatrième appareil électrique à apparaître sur le marché, bien avant l’aspirateur. Sinon c’était la douche, le jet orienté par un opérateur entre les cuisses, on appelait ça la « physiothérapie » et l’on croit savoir que ce massage vulvaire hydraulique, communément appelé douche clitoridienne, contribua grandement à la prospérité des établissements de cure thermale. "
J'aime bien la comparaison utilisée par l'auteur : si vous n'aimez pas les JO et que vous êtes agacés par le tapage médiatique autour de ceux-ci, dites vous que c'est quelques semaines tous les 4 ans. Être un asexuel dans une société qui ne pense qu'au sexe, c'est tous les jours...
via https://tviblindi.legtux.org/shaarli/?xB61CQ
Lisez donc les comptes-rendus du "procès du Carlton" par Pascale Robert-Diard. C'est édifiant sur la nature humaine, la misère sexuelle, la misère tout court...
C'est pourtant simple. Pourquoi autant de gens salissent / pervertissent / compliquent -ils tout ?
via des shaarlistes
Oui, bon, c'est drôle, mais quand on y réfléchit 5 secondes, François n'est pas beaucoup plus progressiste que JP, qui disait que fidélité et abstinence sont les deux seuls moyens de lutte contre le SIDA... Je ne porte pas de jugement hein, je constate. D'un point de vue de catho, ce genre d'affirmation est tout à fait cohérente. Il fait juste son boulot de pape.
Le sexe, par n'importe quel bout qu'on le prenne (j'assume cette phrase ^^) c'est tabou. Même en Suède.
"Oui, en Suède, le pays où il y a des crèches qui se donnent pour mission d'endiguer les stéréotypes de genre en appelant tous les enfants par les mêmes tournures grammaticales, où le "harcèlement de rue" semble quasi inexistant aux yeux d'une femelle européenne plus méridionale et où, globalement, tout apparaît tellement plus avancé que "chez nous" en matière de sexe, de genre et de rapports entre hommes, femmes et autres."
J'aime bien ta façon de dire que tu es d'accord pour expliquer juste en dessous pourquoi tu n'es pas d'accord >> quand tu expliques que le schéma n'est pas neutre, qu'il faudrait faire le même en "neutre" : "quand est-ce que votre partenaire H/F vous doit du sexe?" J'imagine bien ton raisonnement, mais je pense que tu as négligé un point... qui n'est certes pas un détail.
Merci pour le lien vers l'article au passage : http://www.madmoizelle.com/femme-doit-sexe-infographie-273858
Bien sûr que ce logigramme n'est pas neutre : il reflète la réalité.
L'homme a le droit d'avoir envie.
L'homme a le droit de ne pas avoir envie.
La femme a le droit d'avoir envie.
La femme peut avoir plus envie (plus souvent et/ou avec plus de partenaires) que l'homme et ne pas être une salope pour autant (j'aime autant le préciser maintenant, comme ça, c'est fait).
L'homme peut avoir plus envie que la femme (plus souvent et/ou avec plus de partenaires)... et ne doit pas devenir un violeur pour autant.
C'est CA le message subliminal de ce logigramme non-neutre : l'homme peut user de sa force pour contraindre la femme à avoir une relation sexuelle avec lui ; avec une violence moins physique, cela devient : l'homme peut persuader la femme d'avoir une relation sexuelle avec lui, et celle-ci ne doit pas se sentir obligée, ni parce que l'homme est galant, ni parce qu'il a été gentil toute la soirée et qu'il lui a offert des fleurs et a payé le ciné et le restau ; ni parce qu'ils ont déjà couché ensemble (je rajouterais bien : ni parce qu'ils sont en couple voire mariés), ni parce que la fille est habillée d'une manière sexy.
La femme surtout A LE DROIT DE NE PAS AVOIR ENVIE.
On vit vraiment dans un pays de cons... Si je comprends bien leurs griefs, il faut "enseigner la sexualité aux enfants", mais sans dire zizi, sexe ou contraception. Il faut juste parler de sentiments, de cigognes et de choux ?
via http://www.shockmansion.com/2010/09/25/dang-namit-ive-been-tricked-jessica-alba-is-not-naked-in-machete/