Le Préfet de police de Pâris vient de publier un arrêté interdisant à une catégorie de population (les "gilets jaunes") de manifester samedi 23 novembre sur les Champs-Elysées et dans les rues perpendiculaires.
Le communiqué de presse se termine sur ce trait d'humour :
Hors de périmètres faisant l'objet d'une interdiction, le droit de manifester, qui est une liberté fondamentale, pourra s'exercer librement, dans le respect de l'ordre public. Tout attroupement donnant lieu à des débordements sera immédiatement dispersé.
C'est le moment de citer Coluche, je crois :
C'est un pays, la France, libéral, on peut être en colère, il faut demander gentiment, c'est tout.
Alors évidemment, les manifestations, c'est entre "La Nation" et "La République", hein !
Ils vont pas vous la donner entre "L'Étoile" et "La Muette", c'est là qu'y habitent, hein !Je m'énerve pas Madeleine, j'explique aux gens... merde !
Mais y parait qu'entre "La République" et "La Nation", ils ont le droit très très souvent.Et alors à Créteil, entre la gare et la poste, tous les jours si ils veulent...
Et pis je vois la mauvaise foi des gens, je vois bien, tout le monde critique le président de la République, tout le temps, tout le temps, tout le temps, et pourtant c'est pas tout le temps le même... c'est bien d'la mauvaise foi, ça !
Michel Colucci, dit Coluche ; "Moi, ça va", 1977
Depuis six ans, le gouvernement a adopté plusieurs décrets pour autoriser l’identification automatique et massive des manifestants. Cette autorisation s’est passée de tout débat démocratique. Elle résulte de la combinaison insidieuse de trois dispositifs : le fichier TAJ (traitement des antécédents judiciaires), le fichier TES (titres électroniques sécurisés) et la loi renseignement.
L’hypocrisie du gouvernement est totale lorsqu’il prétend aujourd’hui ouvrir un débat démocratique sur la reconnaissance faciale : il en a visiblement tiré les conclusions depuis longtemps, qu’il nous impose déjà sans même nous en avoir clairement informés.
Réponse du gouvernement : "Oh, regardez ce qu'il se passe à Hong-Kong !Ohlala, les méchants chinois !"
La dictature en marche, tranquille :
Devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, mardi, le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, a confirmé que le gouvernement veut adopter au pas de charge un dispositif d’interdiction administrative de manifestation. Mais malgré les forts risques d’atteinte aux libertés publiques, le ministre n’a pas été en mesure de préciser les détails de sa mise en œuvre.
Chose surprenante, certains député·e·s LREM ont l'air de dire un peu moins de conneries que les autres:
Une trentaine de députés LREM ont signé l’amendement de leur collègue Paula Forteza afin de supprimer cet article. Ils y voient «un risque sur le plan constitutionnel» et pointent le fait que le texte ne prévoit pas de procédure de recours. «Il faut encadrer le dispositif par des garanties : établir des critères qui peuvent être contestés par la personne et la possibilité d’un recours devant le juge administratif», plaide Coralie Dubost qui a déposé des amendements en ce sens.
Faux : une manifestation doit nécessairement être autorisée par les autorités pour être légale
Le droit de manifester ne peut pas être soumis à autorisation préalable. Les États peuvent cependant mettre en place un système de déclaration préalable (notification), visant à faciliter l’exercice de ce droit en permettant aux autorités de prendre des mesures pour garantir l’ordre public (c’est le cas en France). En outre, Si une manifestation peut être interdite par les autorités sur des motifs précis, parler de « manifestation autorisée » est donc un abus de langage.
Faux : une manifestation non déclarée est illégale
Le droit international prévoit la possibilité de rassemblements spontanés en réaction à l’actualité par exemple, ne pouvant donc faire l’objet de déclaration préalable. De manière générale, l'absence de notification aux autorités de la tenue d'une manifestation ne rend pas celle-ci illégale et, par conséquent, ne doit pas être utilisée comme motif de dispersion de la manifestation. Les organisateurs qui ne notifient pas la tenue d'une manifestation ne doivent pas être soumis à des sanctions pénales ou administratives se soldant par des amendes ou des peines d'emprisonnement.
En France pourtant, les organisateurs peuvent être poursuivis sur cette base.
L’état d’urgence va encore plus loin, puisque le non-respect d’une mesure d'urgence, notamment l'interdiction d'un rassemblement public, constitue un délit. A ce titre, des manifestants participant à un rassemblement interdit peuvent faire l’objet de poursuites.
Toi aussi joue avec nous et parmi ces images trouve celle qui fait réagir "l'autorité"
EDIT : L'oeuvre en question : L’État matraquant la Liberté
https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/280616/l-etat-matraquant-la-liberte
Voir aussi http://www.lesinrocks.com/2016/06/27/actualite/letat-matranquant-liberte-fresque-jugee-anti-flics-cree-polemique-a-grenoble-11849975/
EDIT 2 : Un ministre qui enjoint un maire de présenter ses excuses à la police, un artiste obligé de justifier son œuvre. Tiens, on va ajouter ça aussi à la liste des bonnes actions à porter au crédit du PS.
http://www.huffingtonpost.fr/2016/06/27/goin-fresque-polemique-grenoble-auteur-justifie-son-oeuvre_n_10695720.html
Au bout de quelques minutes, un slogan vint me cingler les tympans et entamer mon enthousiasme : C’est Julie qu’il faut baiser, pas les salariés ! [1] Non contents d’avoir, dans un élan viriliste nauséabond, traité en chœur la ministre du travail de « salope », ou encore d’avoir appelé au viol punitif à son encontre lors de précédentes manifestations [2], ils appellent désormais à s’en prendre également aux femmes « qui couchent avec l’ennemi ». Fantastique. Eh dites, on leur rasera le crâne à la « Libération » aussi ?
J’essaie de ne pas trop me braquer et de poursuivre mon chemin pour aller retrouver mes camarades. En route, je fais les frais d’œillades appuyées et de commentaires sur mon apparence physique et/ou ma tenue, dont le classique mais non moins flamboyant « C’est pas très malin de venir habillée comme ça ». Vous l’aurez sûrement deviné : je suis en jupe. Je ne scande pas les slogans avec moins de conviction ou de coffre, en jupe. Je ne marche ou ne cours pas moins vite, en jupe. Je peux même pisser plus facilement dans un buisson, en jupe. Je ne suis pas plus vulnérable aux lacrymos, ou aux coups de tonfa, en jupe. La seule chose de laquelle je ne suis pas à l’abri contrairement à vous, et ce, quelle que soit ma tenue, c’est de commentaires sexistes.
via Alda
Des centaines de milliers de personnes défient le gouvernement dans la rue. Une ou deux cassent le double vitrage d’un hôpital. Une ordure tue deux policiers à l’arme blanche. Leur fils de trois ans est en soin à Necker. M. Cazeneuve établit un rapport émotionnel, affectif et psychique entre ces deux séries de faits : la lutte contre la Loi Travail et son gouvernement, le choc produit par la brutalité de ce double meurtre et la situation dramatique de cet enfant. Si les jeunes émeutiers qui ont cassé les vitres de Necker ont été idiots, MM. Valls et Cazeneuve, eux, sont obscènes.
Via Kevin, qui a eu une fois de plus le mot juste :
Pour le coup, comparé à tout le reste, l'hôpital n'a RIEN. Bizarrement, on ne parle pas du Burger King, du Starbuck ou de ces magasins de luxe qui ont vus leurs vitrines explosées. Peut-être parce que ça ne susciterait aucune émotion, n'est-ce pas ? Et vous savez désormais (ou alors vous devriez me lire plus souvent :p) que lorsqu'on utilise vos émotions, on vous manipule.
On devrait demander à la Manip pour tous de s'occuper du comptage. Ils sont assez bons dans ce domaine ^^
Eh les mecs, désolé d'enfiler mon costume du légaliste forcené, mais une manif, ça se déclare en préfecture. C'est la seule contrainte qu'on vous demande, c'est encore trop pour vous ? Commencez par faire les choses dans les règles. Si vous êtes toujours traités comme des moutons que l'on parque dans un enclos,alors ok, vous serez fondés à vous plaindre, et vous aurez le droit pour vous.
Explication de texte : le préfet (mais peut-être l'intervention est-elle ici à mettre au crédit du pouvoir de police du maire) doit faire respecter l'ordre public. Ce n'est pas facultatif, il est nommé POUR ça. (Entre autre choses, mais on ne va pas rentrer dans les détails des attributions des préfets aujourd'hui)
Bref, chacun à son niveau, le préfet et le maire ont des missions de maintien de l'ordre public. Quand on leur dit que dans quelques heures, quelques centaines de manifestants, qui n'ont pas pris la peine de souscrire à la déclaration préalable, vont débarquer et risquer de causer des troubles à l'ordre public, ils prennent des mesures... proportionnées. Dans le cas d'espèce : déploiement d'un dispositif policier à même de prévenir tout débordement. Alors oui, quand on est dedans, et qu'on est traité comme un mouton dans un enclos, ça ne fait pas plaisir. Mais je voulais juste faire remarquer que la légalité républicaine s'appliquent aussi à ceux qui prétendent défendre la démocratie.
Sinon, la photo de la fin d'article sur les "revendications" de la Manif pour tous, euh... WTF quoi.
via http://www.mypersonnaldata.eu/shaarli/?2Aq3Bw