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Et quand je ne joue pas... je regarde les Vieux fourneaux

vendredi 16 février 2024, par Sammy

Quand je ne joue pas, je regarde Les vieux fourneaux.

Les vieux fourneaux, c’est avant tout une série de BD de Lupano et Cauuet, publiée par Dargaud depuis 2014 (7 albums) mettant en scène Pierrot, Emile (dit Mimille) et Antoine, 3 vieux qui n’ont pas bien compris le sens du mot ; j’en ai lu quelques unes, et j’ai bien ri aux aventures de ces éternels rebelles ; notez bien qu’ils ne se sont pas rebellés en vieillissant, mais que si l’âge les a rattrapés, il ne les a pas calmés.

Leurs aventures sont drôles, tant dans les dialogues que dans l’action, parfois touchantes, et sont l’occasion d’aborder à chaque album un sujet grave, de l’accueil des réfugiés au réchauffement climatique, en passant par les violences policières, la dégradation de l’environnement, l’accaparement des richesses, etc. [1].

Dans le 1er film (2017), nos vaillants aînés (la Patrie pas reconnaissante du tout) sont incarnés par Eddy Mitchell, Pierre Richard et Roland Giraud. Il reprend à peu près l’histoire de la première BD, pour ce que je m’en rappelle. Malgré les louanges des journaux, je trouve le film un peu plat, c’est le genre d’histoire linéaire, sans rebondissement, avec situation initiale-élément déclencheur-résolution finale sans trop d’imagination. Le vrai plaisir du film ce sont ses 3 acteurs principaux, et des second rôles parfaits, Alice Pol en Sophie, la petite fille d’Antoine, et Myriam Boyer dans celui de Berthe, ressort fondamental de la partie tragique du film.

Parce que c’est un peu la signature de ces deux films, qui se sentent obligés d’inclure le passage moralisateur-larmoyant vers la fin, pour bien coller au cahier des charges. Les BD font passer un message progressiste ? On va en faire autant. Ici, ce sont les vieilles histoires, celles qui s’attachent aux heures-les-plus-sombres, mais qu’on appellerait tout bonnement aujourd’hui du harcèlement. Et la pauvre Berthe, elle en a gros, c’est pas étonnant qu’elle fasse la gueule.

On retrouve ainsi en 2022 le cégétiste, l’anar et l’ancien joueur de rugby, respectivement Bernard Le Coq [2], et de nouveau Pierre Richard et Eddy Mitchell, 237 ans à eux trois, on ne peut pas dire qu’on soit dans du rôle de composition. Et cette fois, comme indiqué par le sous-titre Bons pour l’asile [3], sera traité le problème des réfugiés.

Mais là encore, si les BD permettent de traiter avec une certaine légèreté des sujets graves, le dessin permettant une certaine mise à distance, la même chose passe moins bien à l’écran : ça fait soit guimauve, soit mélange des genres. Le film oscille donc entre la comédie rurale façon Le bonheur est dans le pré et dénonciation de problèmes grave, sauf qu’on attend en vain Vincent Lindon, pardon pour l’assonance.

Je ne dis pas que c’est pas bien, je ne dis pas que ce n’est pas un bon sujet et, après tout, si ce film a permis de faire passer le message auprès de certains cœurs arides [4], il aura au moins servi à ça. Mais ça tombe avec la légèreté d’un parpaing sur une pièce-montée, et la seule séquence vraiment pertinente c’est lorsque l’excellentissime Claire Nadeau [5], jouant Fanfan, une vieille dame très riche qui a consacré sa vie et sa fortune à aider ceux que la vie a malmené, embarque le psy chargé d’établir son état de discernement dans une virée à travers la misère de la capitale, dispositifs anti-SDF, enrochements anti-migrants et autres saloperies.

Rhalala, je ne voudrais pas donner l’impression de descendre ce film. Regardez-le sur Médiathèque numérique,ça vous coûtera pas un rond et vous passerez un bon moment.

Surtout si, comme moi, Pierre Richard était votre héros d’enfance.


Pierre Richard, 90 ans cette année. Si, si. C’est le moment de placer l’expression bateau « bah il les fait pas ».


[1à noter le dérivé de ce procédé, destiné aux enfants : Le loup en slip ; j’y reviendrai sûrement tant j’adore ces albums

[2Roland Giraud n’ayant pas repris le rôle pour cause de retraite, ça ne s’invente pas

[3j’adore le double sens

[4vous en connaissez tous, les « on les a pas forcés à venir », « ils connaissaient les risques », « moi je me battrais pour mon pays » et autre « on peut pas accueillir toute la misère du monde »

[5mais si... mamie Tuche... Ah, vous voyez que vous savez qui c’est