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Littérature de la pop culture, par Thomas Olivri
mardi 28 janvier 2020, par
J’avais initialement prévu de faire de cet article un article de la série « Et quand je ne joue pas... », mais j’ai considéré que c’eut été tricher, dans la mesure où je l’ai lu en août dernier : on n’est pas vraiment dans quelque chose que je viens de faire ! Je l’ai donc dans un second temps programmé comme un « hors-série » pour un vendredi où je n’aurais pas eu d’article, seulement voilà, je me tiens un peu trop bien au programme que je me suis fixé, et cet article n’arrête pas d’être décalé ! Je me décide donc enfin à la publier, sous peine de le repousser indéfiniment.
J’aime les livres qui donnent envie de lire d’autres livres. C’est l’une des multiples raisons pour lesquelles j’ai beaucoup aimé les livres de Daniel Pennac, et notamment la série des Malaussène : il m’a donné envie de lire d’autres livres (je pense notamment au Manuscrit trouvé à Saragosse, que j’ai vraisemblablement lu grâce au Bonheur des ogres). Et c’est pourquoi j’ai aimé ce Littérature de la pop culture, de Thomas Olivri, qui m’a permis de lire Stardust, de Neil Gaiman, et de découvrir un bon nombre de nouvelles idées de lecture.
J’en ai pour des décennies, c’est horrible !

Mais déjà, qu’est-ce que la pop culture ? Vaste question qui mériterait un article à part entière, et qui risque de nous entraîner bien loin d’un simple compte-rendu de lecture... Quelques recherches sur le web m’ont permis de trouver des définitions, plus ou moins longues, se complétant les unes les autres ; je vous recopie ci-dessous deux variantes qui me semble assez synthétiques :
Le mot « pop » est la contraction du terme anglais « popular » qui n’a pas vraiment d’équivalent en français. On le traduit communément par « populaire » au sens « de ce qui vient du peuple ». Dans son acception anglo-saxonne, le mot désigne « ce qui sort de la rue » par opposition à ce qui est « issu de l’université, de l’élite ou des milieux autorisés ». En ce sens il évoque une notion de « culture de masse » qui est venue s’ajouter, se superposer et parfois s’opposer à ce que l’on appelle traditionnellement la « culture de classe ».
Source : Le Point : De quoi la « culture pop » est-elle le nom ?
La Pop Culture pour les Nuls :
En résumé, nous pouvons dire que la Pop Culture regroupe les œuvres et productions accessibles et connues par le plus grand nombre. Cela va du cinéma et des séries télés aux jeux vidéo, en passant par la bande-dessinée (Marvel, DC Comics), la musique (Daft Punk, Marilyn Manson, Eminem) à la culture web (les mèmes Internet). Cela peut être aussi la nourriture (Mc Donald, KFC, Starbucks), les marques (Apple, PlayStation, Nike) et la mode. La Culture Pop a pour caractéristique d’être connue par tous.
Source : cet article du site Eklecty City, dont la lecture vous permettra d’en apprendre plus sur l’origine de la pop culture, ses différentes acceptions, qui vont de la « culture populaire », forcément considérée comme « médiocre », à la culture de masse, qui n’est pas loin d’être aussi mal considérée, en passant par la culture dominante véhiculée par la télévision, le cinéma...
Pour le cas qui nous intéresse aujourd’hui, il est question des sources littéraires de cette pop culture, on pourrait même être tenté de voir dans cette démarche une forme de légitimation de la culture populaire par ce qui demeure encore perçu comme l’un des signes de la « haute » culture : la littérature. Sauf qu’il sera largement question de formes littéraires longtemps dépréciées et dévalorisées : la science-fiction, la fantasy, l’aventure et le fantastique.
Malgré une introduction dans laquelle l’auteur tente de définir les frontières entre les genres, je trouve a posteriori l’exercice un peu vain : certains auteurs sont inclassables, d’autres appartiennent à plusieurs genres, quand ce n’est pas l’approche du genre en question qui a évoluée au fil des décennies. Ce n’est pas pour rien que l’on parle de plus en plus souvent de « littératures de l’imaginaire »... ce qui s’avère être tout aussi illusoire : croyez-vous vraiment que, parce qu’un récit se déroule dans un monde qui est présenté comme étant le nôtre, il soit moins « imaginaire » qu’un autre se déroulant dans des lieux ou des époques inventées ?
Je note au passage qu’il y aurait une chronologie assez intéressante à faire, qui commencerait avec les auteurs « classiques » fantastiques (Washington Irving, Edgar Allan Poe, Mary Shelley... je rajouterais Guy de Maupassant et Théophile Gautier histoire d’être pédant) ; elle se poursuivrait par une période de chevauchement, avec les romans d’aventures très marqués par le XIXème siècle (Jules Verne, R.L. Stevenson, Herman Melville...) avec des exceptions comme Defoe, puis verrait apparaître la fantasy et la SF, qui se disputent le devant de la scène depuis les années 50, la popularité des auteurs et l’air du temps mettant en avant tantôt un genre tantôt l’autre (Tolkien, Asimov, Dick, Rowling, Martin...) |
Olivri va ainsi chercher ses références dans les auteur·e·s d’hier (J. R. R. Tolkien, Pierre Boulle, Lovecraft...) et d’avant-hier (Poe, Wilde, Stevenson, Kipling...) . Comme quoi ma suspicion de légitimation était peut-être fondée...
On apprend aussi bien des choses en lisant cet ouvrage :
- Mary Shelley n’est pas « que » l’auteure de Frankenstein, elle a écrit de nombreux romans et nouvelles, et peut même être considérée comme une précurseure du féminisme
- Arthur C. Clarke (Auteur de la nouvelle La sentinelle devenu 2001, l’Odyssée de l’espace au cinéma) avait une capacité d’anticipation extraordinaire : il a pressenti internet (« une grande bibliothèque globale et mondiale ») dès 1958, l’apparition d’un système portatif de communication, que les ordinateurs changeraient le monde, le commerce en ligne... Il a commente en direct l’atterrissage d’Apollo 11, mais ce n’est pas là sa contribution majeure à aérospatiale ; il est à l’origine du concept de d’orbite géostationnaire, aussi appelée... orbite de Clarke !
L’ensemble est abondamment et assez joliment illustré, même si j’ai trouvé que bon nombre d’illustrations s’inspiraient trop (voyez ci-dessous celle pour Le Seigneur des anneaux) des adaptations cinématographiques des œuvres en question ce qui, pour un ouvrage consacré à la littérature de la pop culture, est tout de même un comble.
Puisqu’on est dans les bémols, je regrette qu’Alexandre Dumas n’apparaissent pas dans la section des romans d’aventures, alors que E. Rice Burrough est cité dans deux catégories (SF et aventure). De plus, il n’y a vraiment pas beaucoup de femmes, ce qui pourrait amener à se demander si cela est un strict reflet de la réalité, mais quand on constate que même Ursula K. Le Guin est quasiment passée sous silence (elle est expédiée en quelques mots dans l’introduction), on peut se demander s’il ne s’agit pas d’un parti pris, ou d’un manque de recherche dans ce domaine de la part de l’auteur [1].
En un mot : si vous avez déjà lu [2] tous les auteur·es listées dans le sommaire, inutile de vous précipitez sur ce livre ; si vous voulez en découvrir d’autres, c’est une excellente entrée en matière, et une bonne raison pour remettre les pieds à la bibliothèque.
[1] Pour être tout à fait honnête, voici la liste des écrivaines citées : Robin Hobb, Mary Shelley, J.K. Rowling, Anne McCaffrey, Anne Rice
[2] mais vous dormez la nuit ?