Depuis sa sortie caricaturale et caricaturée — c’était de bonne guerre — le réalisateur des monuments que sont Taxi Driver, Casino ou encore Gangs of New York a affûté ses arguments. Dans une lettre ouverte intitulée "J'ai dit que les films Marvel n'étaient pas du cinéma. Laissez-moi expliquer" et publiée par le New York Times, Scorsese s’emploie en effet à mieux poser le débat.
D’un côté, il reconnaît que les deux champs que sont le divertissement audiovisuel à l’échelle mondiale et le cinéma peuvent en effet parfois se chevaucher. De l’autre, il craint « que la dominance économique de l'un soit utilisée pour isoler et réduire l’existence de l'autre ». L’autre champ, celui des films de Paul Thomas Anderson, de Claire Denis, ou de Kathryn Bigelow qu’il cite, permet d’élargir ce qui est « possible de faire et de raconter au cinéma » dit-il. La question est : pourront-ils, à l’avenir, dans un contexte de concentration inédit et de « marvelisation d’Hollywood », continuer à le faire ?
À ce titre, Scorsese soulève une réelle problématique économique et artistique qui ne saurait être balayée. Park Chan Wook, le réalisateur coréen dont les films Old Boy et Thirst ont reçu le Grand prix du Jury au Festival de Cannes, l’a récemment dit dans d’autres termes : "Beaucoup de gens - et ils sont réalistes - estiment que mises à part les grosses productions à la Marvel, il n'y aura plus grand chose à voir d'autre dans les salles de cinéma." La polémique Scorsese contre Marvel prend ainsi la forme d’une interrogation mondiale.